Les archives de Jean Bernabé
Feuilletez l'inventaire des archives de Jean Bernabé :
Les archives confiées à l’Université des Antilles font la part belle à l’universitaire et au citoyen engagé que fut Jean Bernabé, convaincu que « langues et sociétés créoles […] ne pouva[ient] être pensé[e]s que solidairement » (BERN 89, fol. 4r).
Le fonds réunit une vingtaine de conférences et d’allocutions, rédigées en français ou en créole, inédites pour certaines. Cette abondante documentation embrasse les thèmes et concepts chers à Jean Bernabé – diglossie, décréolisation, littératisation du créole… – et met en valeur la continuité de son action en faveur de l’introduction du créole dans l’enseignement supérieur comme dans l’enseignement élémentaire et secondaire.
Cette documentation dessine, dans le même temps, un pan de l’histoire du GÉREC. Si le fonds reste silencieux sur les débuts de ce « groupe de recherches dévoué à l'étude et la promotion des langues et cultures créoles de la zone américano-caraïbe » (BERN 90, fol. 4r) que le jeune agrégé de grammaire fonde en 1975 et qui fut à l’initiative des trois revues Espace créole, Mofwaz et Textes, études et documents, il est s’avère plus riche pour la période allant de la fin des années 1980 à la fin des années 2000, pour laquelle il livre plusieurs rapports, projets, réflexions et déclarations portées par le GEREC en lien avec le travail fondateur de Jean Bernabé sur la codification graphique de la langue créole.
L’action de Bernabé déborde largement la sphère académique. Ses centres d’intérêt scientifiques trouvent un prolongement dans de nombreuses activités associatives et citoyennes dont ses archives conservent la trace : création de l’association Banzil Kreol, fondation du Centre international de recherches, d’échanges et de coopération de la Caraïbe et des Amériques (CIRECCA) à l’origine des Premières journées de la francophonie dans les Amériques en 1989 (BERN 154 et 155), création de l’Université du temps libre (UTL) de Martinique. Ils fondent également ses engagements politiques, entre autres au sein du Mouvement démocrate et écologiste martiniquais (MODEMAS) (BERN 166 à 167), et nourrissent ses interventions publiques : conférences, entretiens donnés à la presse, émissions radiophoniques et télévisées.
La carrière d’enseignant de Jean Bernabé est modestement représentée dans les archives qui nous sont parvenues. Les cours présents dans le fonds sont le plus souvent parcellaires, difficiles à identifier lorsqu’ils ne sont pas référencés comme tels, d’autant plus qu’ils servaient de base à de futures publications avec lesquelles ils se confondent volontiers. Ces cours se rapportent principalement à la préparation du CAPES de créole à l’IUFM de la Martinique (BERN 76 à 78) et du Master 2 Humanités de l’UAG (BERN 68 à 75). Ils couvrent une courte période des années 2000, laissant entrevoir plusieurs concepts forgés par Jean Bernabé en matière d’analyse littéraire : la langue indigène du récit, la langue procurative, langue maternelle/langue matricielle…
Plusieurs pièces d’archives ont trait à l’œuvre de Jean Bernabé, à commencer par son œuvre littéraire. Romancier, Jean Bernabé a publié quatre romans : trois sont parus aux éditions Ecriture - Le Bailleur d’étincelle (2002), Partage des ancêtres (2004), La Malgeste des Mornes (2006) -, le quatrième chez Mémoire d’encrier - Litanie pour le nègre fondamental (2008). En rapport avec ces œuvres, on conserve des contrats d’édition, quelques relevés de droits d’auteur, plusieurs avis de parution, ainsi qu’une partie de la correspondance de Jean Bernabé avec ses éditeurs Jean-Daniel Belfond (éditions de l’Archipel-Ecriture) et Rodney de Saint-Eloi (Mémoire d’encrier). De ces romans, seul un tapuscrit nous est parvenu : il s’agit du tapuscrit de La Malgeste des mornes corrigé et annoté par Raphaël Confiant (BERN 24).
D’autres manuscrits et tapuscrits de fictions, offrant un matériau intéressant pour analyser et comprendre les processus d’écriture de Jean Bernabé, sont néanmoins présents dans le fonds :
- ceux des deux nouvelles, Chimenn (BERN 32) publiée en 2009, et Sa légèreté libellule (BERN 33) publiée en 2011 et dont Raphaël Confiant fut aussi le correcteur ;
- ceux de deux romans restés inédits, Ipamele (BERN 1 et 2) qui, manifestement, était déjà en cours d’écriture en 1999 et dont un chapitre pourrait avoir inspiré Sa légèreté libellule, et N’en pays de Grand Kabicha (BERN 30) envoyé en 2010 aux éditions Actes Sud ;
- ceux, enfin, de plusieurs textes inachevés, parmi lesquels Bouliki dont on conserve pas moins de sept état successifs (BERN 34 à 40) ; à noter que l’un d’eux, daté du 24 janvier 1972, est la pièce la plus ancienne du fonds.
Essayiste, Jean Bernabé signe, entre autres, La dérive identitariste (L’Harmattan, 2016), dont on possède deux tapuscrits (BERN 53 et 54). Auteur de plusieurs ouvrages didactiques, il est aussi à l’initiative d’un projet de dictionnaire créole-français (BERN 60 à 65). Inédit, consultable sur autorisation, ce dictionnaire en 4 volumes et 796 pages, dont la dernière impression date d’avril 2009, a été coordonnée par Bernadette Cervinka.
Enfin, à travers la correspondance – peu abondante cependant –, à travers les annotations et la documentation de travail du créoliste se devinent les relations professionnelles et affinités intellectuelles qu’entretenait Jean Bernabé avec Raphaël Confiant, Patrick Chamoiseau, Daniel Boukman, Isambert Duriveau, Marguerite Fauquenoy, Suzanne Dracius, Gilbert Gratian, Hector Poullet ou encore Ralph Ludwig.
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